mardi 21 avril 2015

Un 21 avril 1896 à Constantinople.

Un 21 avril 1896, naquit Tchèle à Constantinople.
Chassé d'Espagne par l'Inquisition, trois siècles plus tôt. Constantinople fut le refuge de ses ancêtres, La religion, toujours la religion, qui chasse les hommes, les fait fuir, les pousse sur les chemins, les jette dans des embarcations de fortune...
La Méditerranée, d'une rive à l'autre...
Constantinople, quartier Galatasaray, ses juifs pauvres, ses juifs petits marchands ambulants, ses juifs amoureux du Bosphore.
Trois siècles plus tard, à la veille de la grande guerre, les juifs sont malmenés en Turquie, pour Tchèle, il est temps de partir.
Alors Tchèle part. Mais comment part-il Tchèle ? Comment traverse-t-il cette Grande Bleue, une fois de plus ? Sur quel bateau ? Une traversée clandestine ? Peut-être ? Probablement ? Sur un navire de fortune ? Sur une embarcation solide ?
Je ne sais pas. Jamais Tchèle n'en parla à quiconque. Tchèle avait largué les amarres, un point c'est tout.
Débarqué à Marseille, Tchèle monte à Paris. Là-bas, des cousins l'attendent, il va trouver de l'aide. Sa mère, ses frères, tous viendront.
Tchèle tourne la page.
Tchèle, l'analphabète, écrit son histoire Boulevard Voltaire,
Tchèle sera cordonnier, plongeur.
Tchèle sera père de sept enfants,
Tchèle sera français.
Tchèle se prénommera désormais Théodore.
Tchèle ne sera pas déporté.
Tchèle sera gaulliste,
Tchèle ne prendra plus jamais un bateau.
Tchèle donnera à la France un résistant, six enfants cachés, une légion d'Honneur.
Tchèle aimera la vie, sa femme, ses mômes en lisant dans le marc de café.
Tchèle apprendra à lire et à écrire avec son fils, normalien.
Tchèle n'apprendra jamais à nager.
Tchèle restera des heures sur la plage, l'esprit sur l'autre rive de la Grande Bleue
Tchèle, je l'appelais Pépé Catalan, il aurait 119 ans aujourd'hui et j'ai le mal de mer.

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