jeudi 21 août 2014

Itinéraire d'un Ouragan - Lulu Sorcière Archive dans Centre Presse - 21/08/2014

Source AD 86 - Pour bien visualiser l'image, cliquez droit et ouvrir dans une nouvelle fenêtre.

Itinéraire d’un ouragan.
Il est des ouragans sans nom qui laissent sans voix. Celui qui dévasta le Poitou, le 3 juillet 1777 fut de ceux-là. Quarante paroisses concernées, maisons dévastées, arbres arrachés, récoltes perdues. Le jour d’après, treize curés et les Affiches du Poitou racontent. Parmi eux, la plume de Maignen à Champniers s’envole.
"Le trois de juillet le Seigneur fit entendre sa voix (…). Vers les cinq heures du soir il ordonna au vent, à l'eau, au feu, au tonnerre, de se mêler et confondre ensemble pour former un tourbillon horrible destructeur de la plus précieuse portion de nos arbres (…) Mon pinceau n'est pas assez fort pour en tracer le tableau ; je frémis d'y penser. J'appelle à moi dans ce moment toutes mes pensées, mes sentiments et tout cela bouillonne dans ma tête, il me semble jusque sur le papier j'éprouve en même temps que, malgré l'effervescence de mes efforts, toute l'énergie de l'expression ne peut se proportionner à ce que je voudrais exprimer. »
« Figurez-vous donc une obscurité effrayante que les plus vifs éclairs n'interrompent que pour exciter dans le fond de l'âme un saisissement qui recommence à tout instant, on ne distingue point dans l'instant lequel des éléments dont la toute puissante main de Dieu a rompu l'équilibre fait le plus de fracas, l'éclat du tonnerre intercepté ne le propage point jusqu'à l'oreille, mais il n'en faut pas douter il est dans cette affreuse discordance la plus forte voix.
 La terre comme ébranlée ne peut retenir les arbres, les uns tombent en entier couvrant un terrain considérable ensemencé, d'autres perdent leurs branches que le tourbillon disperse au loin et de tous côtés. Le fracas de leur chute n'est point entendu un moindre bruit est absorbé par le plus grand, Dieu qui nous ménage en nous frappant semble cacher les convulsions de la nature pour ne pas tant effrayer ceux qui, surpris par l'orage, dans les chemins, se jettent dans des fosses sous les haies pour attendre pendant une heure et demie quel sera leur sort.
Retiré dans mon église j'attendais aussi avec la frayeur d'un pilote qui tient à peine le gouvernail, la fin de la tempête, et pour rentrer dans ma maison il m'eut fallu un bateau, la rivière domestique que la pluie avait formé ne s'écoula pas aussitôt que je l'aurais souhaité… Mais j'étais le moins à plaindre Tout le public gémissait non seulement sur le mal déjà fait mais encore sur le danger que la moisson semblait courir …. Lorsqu’enfin le ciel tout à coup redevint serein, sécha la faucille du moissonneur…. 
Conclusion :  un évènement de cette conséquence sera l'époque la plus remarquable de l'année mil sept cent soixante dix sept, il doit nous pénétrer de reconnaissance de ce que Dieu en brisant les arbres s'est contenté d'avertir les habitants de la terre. »
Nous devons aux colistiers de GE86 la traque de ce souffle dans les archives. Parmi eux, Sébastien Pissard pour Champniers et Alain Texier qui a illustré l’itinéraire de cet ouragan. Vous trouverez sur le blog et sur GE86, le dossier complet de cet ouragan sans nom.  

Sources :
-          Archives de la Vienne.

-          Archives insolites GE86.